samedi 29 septembre 2018

Neige et pétrole Kazakh : choisir son chemin...


Neige et pétrole Kazakh : choisir son chemin, choisir sa vie...
La découverte de gisements de pétrole au fond de la mer Caspienne est ce qui a permis la croissance du Kazakhstan, ou du moins d'une partie de sa population. A Almaty, une cité moderne très agréable entourée de montagnes enneigées et parsemées de parcs et jardins, j'ai été frappé par le nombre de grosses voitures ( Mercedes à la plus grosse côte ici), de restau chics, de jeunes branchées. Rien à voir avec le Kirghizistan que je viens de quitter.
Bon, comme ce n'est pas vraiment ce que je suis venu voir ici en Asie Centrale, j'ai fait une petite virée à ma façon dans les montagnes les plus proches du centre ville. A 30 km à peine, il n'y a plus personne ou presque, et beaucoup de neige... Ce qui on le verra plus loin va me causer quelques difficultés. Mais en même temps c'est ce que j'étais venu chercher, de la difficulté...
Peut-être pas à ce point, mais on ne peut pas prévoir à l'avance ce qui nous attends lorsqu'on s'engage dans l'inconnu.
L'inconnu en l'occurrence c'est un trek sur le papier d'environ 35 km rejoignant la vallée de Shimbulak à celle d'Ozero bolshoe.
Pas de carte, des indications très floues, et un sentier... inexistant ! du moins sur toute la partie médiane.
Un bus me conduit jusqu'à la station de ski de Shimbulak d'où je commence à grimper sur une route goudronnée qui laisse place à un chemin 4x4 puis à une vague trace d'un engin à chenille dans la neige.
La trace conduit jusqu'à une station météo avec quelques baraquements en tôle. Je suis à 3100 mètres déjà, et le coin semble abandonné. Je suis seul hormis un chien qui depuis 5 km me suis. Je fais un peu le tour des installations lorsque tout à coup j'entends un bruit.
Une sorte de molosse russe ( un homme cette fois, pas un chien) sort d'une sorte de gros tonneau en tôle faisant office pour lui de studio cabine. Il m'interpelle et me demande ce que je fais là, pas vraiment agressif mais pas amical non plus. Je lui explique plus ou moins en anglo/russe que je veux poursuivre jusqu'au col et lui demande conseil sur la trace à suivre. Il me l'indique mais me déconseille de poursuivre car il est déjà tard ( 14h) et il y a beaucoup de neige sur le sommet.
Je décide de tenter le coup jusqu'à 15h au moins,  ensuite je verrais où j'en suis.
J'attaque droit dans la pente, il n'y a aucune trace, j'ai de la neige jusqu'à mi mollet et je suis en short avec des chaussures de trail running aux pieds...
Le chien me suit encore un peu puis tout d'un coup disparaît, il a dû faire demi tour. Son instinct lui a t'il dicté que c'était plus prudent ? Le mien est en pleine hésitation...
Le plus dure ce n'est ni la neige ( assez molle) ni la pente ( pas vertigineuse) mais plutôt le terrain fait de gros cailloux sous la neige qui me cause quelques pertes d'équilibre entraînant bleus ou coupures sur les chevilles et les tibias.
Je progresse néanmoins assez vite, le sommet approche et j'appréhende ce que je verrais de l'autre côté : une pente à pic infranchissable, d'autres montagnes encore plus hautes ? Ou une voie de sortie et une vue sur la vallée d'Ozero ?
A 15h10, après 2200 mètres d'ascension en 4h30 j'arrive au " col". Je suis à 3834 mètres et....
Ouf, l'autre versant débouche au loin sur une vallée verdoyante et la pente reste raisonnable.
En plus la vue est magnifique et le soleil toujours bien présent. J'ai une petite poussée d'adrénaline et une certaine satisfaction intérieure même si bien vite je réalise qu'en fait je n'ai fait que la moitié du chemin.
La descente est presque plus pénible que la montée au début, toujours à cause de ces satanées cailloux sots la neige. Chaque pas demande une grande vigilance pour ne pas se tordre la cheville, c'est mentalement épuisant et rend ma progression assez lente. Frustrant pour une descente.
Petit à petit, pas après pas, j'arrive enfin au bout d'une heure trente sur un semblant de sentier.
Il reste au début sur une sorte de ligne de crête , moitié herbeuse moitié enneigé. Ce mélange de blanc immaculé et de couleurs d'automne, le tout sous une lumière crépusculaire est simplement jubilatoire. Et si l'on rajoute le dernier album de Christine and the queens que je suis en train d'écouter sur mon portable, c'est une forme d'extase pour moi ( la fatigue y est certainement aussi pour quelque chose...).
Du coup le reste de la descente est presque une partie de plaisir, je cours, je gambade, je sautille.
Je suis d'une certaine manière dans ma zone de confort. Et lorsque la nuit arrive je débouche sur la route menant à l'observatoire d'Ozero Bolshoe, près du lac d'almaty. Il est censé y avoir un peu plus loin un arrêt de bus, mais je ne sais pas si le bus roule encore à cette heure ( il est 19h, j'ai marché ou couru près de 8h). Du coup je me mets à faire du stop. Je n'attendrai pas bien longtemps cette fois, et un couple de Kazakh dans une belle bmw  me ramènerons proche du centre ville.
Un dernier bus jusqu'à mon auberge et me voilà arrivé à bon port.
Entre le pétrole Kazakh (et l'apparence de richesse extérieure qui va avec) et les montagnes enneigées Kazakh ( et le sentiment de jubilation intérieure qu'elles peuvent procurées ), pour moi le choix est vite fait.
Ma pente naturelle me ramène toujours vers la nature et le défi personnel , appréciant d'autant plus les kilomètres lorsqu'ils sont gagnés de haute lutte.
Sylvain Tesson soulignait ainsi que : " pour ceux qui craignent de tourner en rond, il y a la solution de s'engouffrer droit devant soi, de se lancer à l'aventure, et de trouver la paix, en battant les chemins".















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