mercredi 14 juin 2017

Fuji san.

Il n'y a certainement pas de symbole de leur pays plus fort pour les japonais que le Mont Fuji.
De ce fait l'apercevoir est un incontournable de tout voyage au pays du soleil levant et entreprendre son ascension une expérience mythique voire mystique.

J'en avais fait un objectif majeur de mon séjour mais lorsqu'à mon arrivée au Japon je me suis rendu compte qu'en montagne la neige n'avait pas encore disparu je m'étais plus ou moins fait une raison. J'ai néanmoins voulu le voir au plus près et me suis donc rendu au lac Kawaguchiko juste avant de finir mon périple japonais.
Il était là, volcan majestueux avec son cône parfait et son sommet effectivement encore bien enneigé.
Une discussion avec les autres touristes présent aillant tenté l'ascension m'a laissé dans l'expectative. Possible ou pas, avec ou sans matériel d'alpinisme, depuis le bas ou en prenant un bus jusqu'au point routier le plus haut ?

Finalement j'ai opté pour la voie de la sagesse ( enfin ma conception de la sagesse, c'est à dire ne pas renoncer à ses rêves et laisser parler ses intuitions les plus profondes) et je suis parti de bon matin directement de mon auberge avec un vélo de ville loué sur place à l'assaut de la montagne sans rien d'autres que mes chaussures de rando, des habits chauds et quelques provisions dans mon sac.

La route bien goudronnée au début, avec une pente raisonnable me permet d'avancer à un bon rythme même si je n'avais plus posé mes fesses sur un vélo depuis plus de 6 mois.  Mais très vite je me rends compte que je n'ai pas pris la bonne route, devoir faire demi tour m'agacerait au plus haut point du coup je décide de couper à travers un sentier pour retomber, je l'espère, sur la bonne route. Et me voilà entrain de faire du vtt avec ce vélo à la base conçu pour chercher le pain... Après 2 ou 3 km, parfois à pousser le vélo, je tombe effectivement sur la route désirée, elle continue sur 15 km encore jusqu'à une sorte de station d'altitude à 2300 mètres ( sachant que je suis parti du lac à 850 mètres) qui constitue pour la plupart des personnes le point de départ vers le sommet du Fuji.
A part que à partir de là officiellement tout est fermé jusque début juillet...
Bon, étant rebelle dans l'âme je passe outre, pose mon vélo contre un mur et continue vers le sommet, vaille que vaille.

Tout de suite je sens que cela ne sera pas une partie de plaisir, mes cuisses sont bien entamé par ces 3 heures de vélo préparatoire et la pente est rude d'entrée.
Je décide de faire une pause un peu plus longue que prévue et surtout d'adopter un rythme plus sage. Le chemin est très bien balisé, et pour cause en juillet / août près de 300000 personnes gravissent la montagne. Mais aujourd'hui je ne croiserai qu'une dizaine de personnes. Il s'agit d'abord d'une sorte de terre battue volcanique puis de roche volcanique et enfin au dessus de 3000 cette fameuse neige que je redoute surtout si elle s'avère être durci par le gel.

Je progresse dans un ciel très nuageux avec parfois des rafales d'un vent glacial. Les premiers passages dans la neige sont sans risques car les traces sont profondes et la pente raisonnable. Je reprends espoir même si un peu plus haut je vois deux japonais en train de galèrer. Ils sont à bout de souffle et vraiment impressionné par ma tenue légère. Ils ont des chaussures avec crampons, des bâtons, veste de ski, gants et bonnet ! Il faut dire qu'il doit faire 2 ou 3 degrés maximum. Ils hésitent à continuer car il est déjà 14 h.

Pour ma part sentir le sommet proche me redonne un coup de fouet et j'accelere le pas malgré les 3500 m d'altitude. J'arrive sur un court passage vraiment pentu ou la neige est verglacé. Sans crampons c'est trop risqué. Je cherche un peu sur ma gauche un autre passage et je trouve quelques rochers ici et là qui m'aident à avoir une prise fiable. L'adrénaline monte et je me dis que je ne pourrait pas raisonnablement continuer ainsi bien longtemps, surtout que le brouillard me cache la vue et que le vent redouble, je décide d'aller au moins jusqu'au prochain cabanon que j'aperçois quelques mètres plus haut et d'y faire le point.

Un dernier rocher à contourner et m'y voilà, et là... Et bien je me rends compte qu'il n'y a plus rien au dessus ! Je suis au sommet, à 3772 mètres, après 6h d'effort et quasiment 3000 de dénivelé dans les pattes.
Il y règne une ambiance de bout du monde ou d'enfer... C'est selon les points de vues. Des habitations toutes closes et couvertes de givre, un vent ahurissant et pas âme qui vive.
Je me dépêche de faire quelques photos et de m'approcher du bord du volcan. Son cratère est inactif et couvert de neige, mais néanmoins impressionnant. Il est 15 h, et je dois bien vite entreprendre le chemin du retour. Quelques rayons de soleil font leurs apparitions et combinés à mon émotion d'avoir finalement atteint le sommet cela me donne des ailes, la descente se passe bien, en 1h15 je retrouve mon vélo 1500 mètres plus bas et je n'ai plus qu'à me laisser glisser jusqu'au lac. Encore quelques coup de pédales et me voilà de retour à l'auberge. Je suis bien sûr extrêmement fatigué après ces 9h d'efforts mais aussi profondément heureux.

Pour les japonais celui qui monte une fois au sommet du fuji est un sage, mais celui qui y monte deux fois un fou. J'en resterai donc là.
Un peu plus sage ? Peut-être.
Un peu plus riche ? Sans doute.
Un peu plus japonais ? Assurément.














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